1/15/2007

Créer de la Valeur Ajoutée et fixer un prix (Value creation and pricing)

Le concept de "Value Creation":

Selon T.Jelassi et A.Enders dans le livre "Strategies for e-business", "l'abilité d'une entreprise à créer de la valeur ajoutée est une condition prérequise pour atteindre une profitabilité permanente et régulière. Dans le cadre du développement de stratégie e-business, le concept de "value creation" mérite une attention particulière, et beaucoup d'entrepises ont couru à la faillite une fois le boom Internet passé, n'ayant pas accordé assez d'importance à cette question. Leur attention était plutôt concentré sur l'acquisition de nouveaux clients et la croissance de leur revenu, ce qui ne pouvait fonctionner tant que les marchés financiers voudraient bien les supporter.

Aujourd'hui, dans un environment encore plus turbulent, il est impératif que la strategie se concentre sur quelle valeur créer et pour qui, aussi bien que sur comment la créer et comment capturer cette valeur sous forme de profit. En terme économique, la valeur créee est la différence entre le bénéfice apporté au client (bénéfice client) et le coût généré pour sa création".

Le bénéfice client ou bénéfice perçu par le client peut se présenter sous diverses formes :

- le produit ou service lui même

- la rapidité de la livraison

- la marque ou réputation

- la commodité et facilité d'utilisation d'un service

- la vairiété de choix

- le niveau de personnalisation


Mettre en place ces services, atteindre un certain niveau de qualité et livrer ont un coût. Le premier challenge est d'identifier la valeur créee, qui donc, pour rappel, est la différence entre le bénéfice client et le coût pour le produire (il n'est pas question de marge ou de prix de vente pour l'instant).

Le terme de "bénéfice perçu" est employé à juste titre puisque cette perception est variable suivant les clients; tous les clients photo ne veulent pas du tirage 1H à retirer en magasin et vice versa. Une bonne gestion CRM permet d' identifier ces écarts de perception.

Pour la gestion des coûts, il s'agit de bien distinguer et classer ce qui est du ressort:

1- des coûts variables: frais de livraison et fournitures minilab par exemple; ces coûts peuvent être directement attribués à un produit ou service.

2- des coûts fixes: developpment du site web, investissement marketing et publicitaire, coût de stockage, etc...Ces coûts ont évidement une répercution sur l'ensemble des produits et services délivrés à travers le site Internet. Ils varient en fonction de la taille de l' entreprise (economie d'échelle) et de l'utilisation de sa capacité (un minilab à 10 tirages /jours vs un minilab à 1000 tirages /jours, ou une plateforme logistic 1 APN vendu /jours vs 1000 APN vendus/ jours).

T.Jelassi et A.Enders évoquent deux règles à respecter pour réussir son déploiement stratégique.

La valeur créee:

1- Doit être positive: le coût doit être inférieur au bénéfice client. Beaucoup d'entreprises investissent en masse pour un bénéfice client très faible. Le risque est de retenir l'attention de très peu de clients en retour.

2- Doit être supérieure à la valeur créee par la concurrence: sinon il sera difficile d'envisager une présence à long terme. Un compétiteur pourrait réduire ses coûts en dégageant le même bénéfice client, ou améliorer ce bénéfice client sans augmenter son prix de vente.

Il est donc important pour une entreprise est donc que sa valeur créee soit supérieure à ses concurrents, et il est aussi important que cette valeur soit captée sous forme de profit (marge, bénéfice). Selon T.Jelassi et A.Enders, la création de valeur ajoutée ne dit rien en elle même sur la façon dont elle est répartie entre le consomateur et le producteur d'un service. C'est le prix de vente lui même qui determine comment la valeur créee est distribuée en la divisant en deux entités: le "surplus producteur" et le "surplus consommateur".

le "surplus producteur": la différence entre le prix de vente et le prix de production (d'achat pour un revendeur)

le "surplus" consommateur": la différence entre le bénéfice client, équivalent au prix maximum qu'il est prêt à payer, et le prix qu'il a effectivement payé. En general les consommateurs vont rechercher les produits/services qui offrent le meilleur surplus, ce qui signifit un bénéfice client plus important pour le même prix, ou un prix plus bas à qualité comparable.

Il y a deux facteurs qui influencent la distribution de valeur ajoutée entre producteur et consommateur:

la structure elle même de l'industrie:

En étudiant l'environement dans lequel l'entreprise évolut, on peut mesurer et fixer des attentes réalistes en terme de profit comparé à la valeur créee. Une compétition intense, comme cela est le cas dans le monde de la distribution photo depuis quelques années, signifit forcément une forte valeur ajoutée pour un profit faible. Les nouveaux acteurs entrant sur le marché, à la conquête de parts de marché ont naturellement tendance à proposer plus pour moins chère. La valeur créee à donc plutôt tendance à balancer du côté consomateur.

Le niveau relatif de valeur créee par l'entreprise:

Le niveau relatif de valeur créee par l'entreprise en comparaison à ses concurrents est le deuxième facteur qui détermine le niveau de profit. Si une entreprise parvient à générer plus de valeur que ses concurrents, elle possède alors le potentiel de générer plus de profit. Jelassi et Enders cite l'exemple de Dell qui est parvenu à devenir la société la plus rentable dans l'industrie ultra concurrentielle de l'informatique, tout en maintenant les prix les plus bas du marché, et en vendant uniquement sur le net. Le succés de l'opération s'est basée sur l'élimination des intermédiaires les plus couteux (cf post sur "disintermediation, re-intermediation"), ou apportant le moins de valeur ajoutée dans la chaine de création de valeurs. Dell continu d'utiliser certaines batteries Sony qui ne sont pas les plus économiques, mais correspondent à un critère de qualité minimum exigé par ses clients.

En pratique, comment mettre un prix sur un produit/service?

Dans un article publié en 2006 dans le "Journal of business strategy", et intitulé "conduire la croissance avec de nouveaux produits: les pièges courants à éviter pour fixer ses prix", J.Hogan révèle trois principaux pièges à éviter pour déterminer le prix d'un produit/service; pour passer de la méthode du 20ème siècle à celle du 21ème , c'est dire en tenant compte de l'importance de la mondialisation (où la faible valeur ajoutée à tendance à être facilement délocalisable) et du développement du e-commerce.

1er piège- Fixer les prix en fonction d'un bénéfice au lieu de la valeur:

En magasin, la manière traditionnelle de fixer un tarif est de calculer une marge acceptable sous forme de pourcentage, tenant compte du prix d'achat (ou de production) et d'une estimation du prix que le consommateur est prêt à payer. Le prix de vente est donc calculé en fonction d'un profit (bénéfice) attendu. Le problème est que l'estimation du prix prêt à être payé par le consommateur est souvent sur ou sous estimée ; c'est d'ailleurs plus souvent le cas qu'on ne le croit en ce qui concerne la sous estimation cf le prix des extensions de garantie d'APN qui semble poser plus de problème au vendeur qu'à l'acheteur lui même.

Il s'agit donc de fixer son prix en fonction de la valeur du porduit/service, celle perçue par le client. En terme concret, et au delà de l'idée de fixer son prix à la tête du client, cela peut résulter dans la bonne décision quant au fait de facturer (et à quel prix) le transfert des cartes mémoires sur CD par exemple. Si le client n'en à pas besoin, il ne le payera pas, dans le même sens, pourquoi s'obstiner à lui offrir si il n'en a pas besoin?

Comme précisé précédement la perception du bénéfice client est variable en fonction de chaque client et c'est ici que la gestion CRM intervient. Un système CRM doit permettre de définir une segmentation client (et non plus produit ou service) assez précise pour savoir quoi vendre à qui et à quel prix. Dans l'exemple du CD il s'agit de vendre cette prestation aux clients qui en ont réellement besoin, ceux qui n'ont pas le temps ou les compétences pour le faire par exemple. Mais avec le stockage des photos en ligne et la facilité accrue du transfert des photos cette part de marché client devrait décroitre dans les années (mois) à venir. La valeur perçue par les clients toujours dans le besoin de ce service ne devrait alors pas changer, mais il faudra alors se poser la question si le coût de production d'un CD permettra toujours de le vendre au même prix, ou si il n'est pas plus judicieux d'investir aujourd'hui dans un service de stockage en ligne (quitte à transférer les cartes mémoires depuis un pc ou une borne du magasin).

2nd piège- Manager le risque client avec le prix:


Au lancement d'un nouveau produit ou service, il existe par définition un risque que ce produit/service ne corresponde pas à l'attente des consommateurs ou présente des défaillances et faiblesses à leurs yeux. La tentation est alors grande d'offrir une remise ou de baisser le tarif initialement prévu pensant que ce geste permettra de gagner la confiance du consommateur. Cette tactique a souvent pour unique effet de décroitre les bénéfices. Selon J.Hogan, pour donner une véritable réponse à ce phénomène, la meilleur solution réside dans le maintien d'un bon niveau de prix couplé à une bonne analyse séparée des risques. Une analyse des risques quantifiée permet à coup sur d'identifier et mesurer avec réalisme les potentiels problèmes à rencontrer; ces risques étant dans la plupart des cas perçus avec exagération par les consommateurs. Un exemple actuel dans l'industrie de la photo pourrait être la question de la pérénité des APN. Nombre de clients sont inquiets sur le fait de pouvoir faire réparer leur appareil photo dans deux ou trois ans. L'une des réponses possibles est l'extension de garantie, contrat dans lequel l'APN sera réparé ou éventuellement échangé en cas de panne non réparable. Une autre réponse possible, à mon avis la meilleure en terme de valeur ajoutée provient d'un acteur purement virtuel (je ne mentionnerai pas son nom pour ne pas choquer). A chaque vente une assurance est proposée pour un remplacement systèmatique par un modèle d'actualité en cas de panne. Si la valeur ajoutée est évidente pour le client, le système doit bien entendu être basé sur une étude de risques garantissant un équilibre entre la contributions de l'ensemble des souscripteurs et les potentiels frais liés aux échanges. Nul doute que ce mécanisme, en plus de faciliter des ventes, doit aussi permettre à cette entreprise de faire des économies sur sa gestion SAV et fidéliser sa clientèle (cela fonctionne pour plusieurs lignes d'appareils électroniques, du mp3 à la carte mère de pc).

3ème piège: Ne pas manager la trajectoire des prix.

Les termes employés dans ce 3ème sous-titre suppose que les prix une trajectoire, c'est à dire une évolution dans le temps. Cela est d'autant plus vrai dans le domaine de l'électronique où les durées de vie des produits et services deviennent de plus en plus courtes. A peine un produit/service est mis sur le marché, il est quasiment systèmatiquement imité ou dépassé par un compétiteur qui , à la conquête de parts de marché, proposera un prix plus bas pour les mêmes fonctionalités. Une attitude réactive consisterait à aligner ses prix et entrer dans la guerre des prix. J.Hogan propose 3 manières plus proactive pour ralentir l'érosion des prix.

Ajouter de la valeur, pas des fonctionnalités.

Une attitude des plus courantes consiste à rajouter des fonctionnalités en maintenant son prix. Ceci résulte le plus souvent en l'addition d'éléments totalement inutiles aux yeux du consommateur, laissant de côté la valeur perçue.

Planifier le déploiement de services en plusieurs étapes.

Il s'agit d'anticiper et de préparer un panel d'améliorations des services lié au produit, et de les proposer au bon moment au bon client.

Se concentrer sur sa part de marché client:

Dans un contexte très concurrentiel, plutôt que fixer des objectifs de gains de part de marché, augmenter sa part de marché client en diversifiant ses produits/services, proposer des offres bundle personnalisées: par example pack tirage avec forfait sauvegarde cd et partage en ligne des photos.

A suivre avec une étude sur la chaine de création de valeurs et la ré-intermédiation.

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